Et si nous étions les derniers freins au changement ? #SU #Day5

Durant cette cinquième journée il était essentiellement de transformation, changement, de créativité, d’innovation et de collaboration ! Il est toujours assez étonnant de constater qu’ici, lorsque des sujets comme la création ou l’innovation sont abordés, il est davantage question de probabilités que de fulgurances. 

Quand on me demande comment j’ai eu l’idée de mes différentes entreprises, j’aime raconter l’histoire qui m’a conduit à voir une idée émerger, comment cette idée a commencé à m’obséder, comment je l’ai mâchouillée, développée, et comment elle finalement occupé mon esprit des années. A l’inverse, la Silicon Valley a fait de la maxime de Linus Paulding son mantra : «  Si vous voulez avoir de bonnes idées, il faut en avoir beaucoup ». Il ne s’agit pas de trouver l’idée qui deviendra le moteur principal de votre vie, mais trouver celle qui rencontrera le succès. Et fera ainsi de vous un homme riche.

Si cette approche illustre bien l’idée chère à l’industrie logicielle de « pivot » (consistant à détourner l’usage initial d’un produit pour en trouver un qui trouvera son public), elle reflète surtout l’état d’esprit focalisé sur le business des personnes évoluant ici. Il en ressort néanmoins un certain nombre d’idées et bonnes pratiques utiles lorsque l’on souhaite créer quelque chose. Morceaux choisis.

  • La puissance de la communauté 

Pascal Finette, passionné d’innovation collaborative, explique comment pendant 35 ans, la Nasa a chercher à modéliser la prédictibilité des éruptions solaires. Sans succès. Elle a donc décidé de lancer une compétition auprès du grand public afin de résoudre cette énigme. En quelques semaines, la communauté revenait avec un modèle qui, s’il ne permettait pas de les prédire, a permis à la Nasa d’avancer plus rapidement qu’elle ne l’a fait en 35 ans.

Dans l’industrie logicielle, les logiciels open-source sont conçus selon cette même logique collaborative. Le code d’une application informatique est mis à la disposition de la communauté intéressée par l’application en question. Et ce sont les membres de la communauté qui développent de nouvelles fonctionnalités, prennent soin de maintenir et d’améliorer le code de façon continue, etc. Un peu comme si une entreprise disposait de centaines, voire de milliers de développeurs, pour faire évoluer un produit. Le rêve ! Mais alors, comment gagner de l’argent ?

Lorsque le code d’une application informatique est donné à la communauté, rien n’empêche une entreprise de proposer des services autour de cette application. Si Linux est un système d’exploitation open-source, il n’empêche pas la société Red Hat de prospérer, proposant toute une gamme de services que les CTO du monde entier sont ravis d’acheter. Tout cela partant de cette réflexion de bon sens qu’il y aura toujours plus de personnes intelligentes hors de l’entreprise qu’à l’intérieur, et ce quelle que soit la taille de celle-ci.

L’enjeu réside en réalité dans sa capacité à engager les membres de sa communauté, sachant que l’argent constitue une très bonne mauvaise devise lorsqu’il s’agit d’engagement ! Reste à déterminer ce qui constituerait une devise adaptée à ses interlocuteurs.

  • La solution à un problème vient souvent d’un non-expert

PepsiCo, la maison mère des chips Doritos, a décidé de lancer il y a plus de dix ans une nouvelle publicité pour ce produit. Plutôt que de faire appel à une agence, elle lance une campagne de crowdsourcing appelée « Crash the Superbowl ». 4000 personnes participent. Quelques semaines plus tard, l’entreprise tient son idée et une publicité qui fait le bonheur du Superbowl (regardez-la elle est vraiment réussie). Le tout grâce à un mangeur de chips !

Cela viole toutes les idées reçues selon lesquelles il faut être un spécialiste de la publicité pour en concevoir une de qualité. Il s’agit pourtant de bon sens. Un expert dans un domaine donné est quelqu’un qui a développé un tel niveau de connaissance et une telle expérience dans un domaine donné qu’il n’a même plus besoin de réfléchir pour agir dans ce domaine. Il en maîtrise tous les codes, toutes les subtilités, etc.

Mais comment arriver à faire quelque chose de nouveau si l’on est persuadé qu’il est « possible » de faire ça mais « impossible » de faire ci ? En trois ans et demi, deux inconnus du secteur (Google et Apple) ont raflé le marché de la téléphonie mobile, faisant ainsi chuter Nokia de son piédestal. Quiconque a déjà joué au poker sait également qu’il est très difficile de jouer contre quelqu’un qui n’a jamais joué car il ne respecte aucune règle – ne les connaissant pas – et est donc extrêmement imprévisible. Et donc souvent dangereux.

Bien entendu, ce n’est pas de l’intérêt des experts et des sachant de tous crins de vous dire que vous pouvez disrupter un domaine auquel vous ne connaissez pas grand-chose, mais c’est pourtant le cas.

  • Pourquoi le changement n’est pas une bataille
l'art de la guerre

John Hagel vient ensuite nous parler de la transformation au sein des grandes entreprises. S’appuyant sur « L’art de la guerre » de Sun Tzu, il explique qu’un changement massif au sein d’une organisation nécessite trois éléments fondamentaux : 

  1. Identifier les amis du changement
  2. Identifier les ennemis du changement
  3. Affaiblir les ennemis plutôt que de mener bataille

Amusant tout d’abord de constater que les amis du changement sont rarement ceux à qui il est demandé de fournir des efforts pour changer. Or les dirigeants d’entreprise sont souvent ceux à qui l’on demande de passer d’un management autoritaire à un management participatif, d’une culture de la décision descendante et centralisée à une culture ascendante et distribuée, de bureaux bien confortables à des open-spaces afin de se rapprocher de leurs équipes.

Si l’on considère que le changement doit partir du haut, comment faire pour que le « haut » décide de renoncer à tous les privilèges qu’il a mis une vie professionnelle à acquérir ? Et qui sont encore considérés par la majorité comme les signes extérieurs de pouvoir ou de réussite ? Le subtil enjeu réside dans le fait d’initier ce changement sans affronter directement les personnes concernées.

Selon John Hagel, pour gagner la bataille, il faut que celle-ci n’ait jamais lieu ! Il faut à la fois que les pourfendeurs du changement démontrent à force de réussites locales et de success-stories ses vertus, et affaiblir sans que cela ne soit trop évident ceux qui veulent l’empêcher.

Une nouvelle fois, ce qui est au coeur de la transformation des entreprises et de l’innovation collaborative est notre capacité à faire évoluer nos mentalités. C’est finalement l’une des leçons majeures que je retiens de ce séjour. Nous sommes les principaux freins à la transformation et à toute forme d’innovation, car la limite aujourd’hui n’est plus technologique mais est liée à notre imagination ! Et à notre capacité à nous réinventer en oubliant un à un les codes du monde que l’on quitte peu à peu.

Oui, nous sommes bien au milieu d’une crise, où l’ancien se meurt et le nouveau n’est pas encore né. Nul doute que nous en sortirons. Reste à savoir quels seront les contours de ce nouveau monde que nous sommes en train de créer, consciemment ou non 😉

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